Depuis plusieurs années fleurissent des articles s’interrogeant sur l’avenir de la communication interne, sa raison d’être, sa pertinence dans un monde où les frontières sont devenues très poreuses. Le débat sur ce sujet est légitime et on peut notamment rappeler ce truisme : tant qu’il existera un public interne, il existera une communication interne. Même si celle-ci ne correspond plus à une direction, un service ou même une fonction de l’entreprise. Cependant, l’enjeu de la réflexion est-il bien là ? La question est-elle : quelle forme donner à la communication interne ? La question n’est-elle pas plutôt : au regard de l’évolution des organisations bousculées par les projets de transformation, des aspirations des personnes (notamment de l’importance croissante du besoin d’épanouissement au travail), mais aussi des nouvelles possibilités d’accès à l’information, quelles sont aujourd’hui les attentes des collaborateurs en matière de communication ? Et comment répondre le mieux à ces attentes ?
Une nouvelle frontière de la communication est déjà là. Un défi, apparu notamment avec l’accélération des projets de conduite de changement : celui de faire de la communication un levier de modification des comportements.
Pour tout observateur des métiers de la communication et plus généralement du monde de l’entreprise, il est indéniable que la communication « top-down » a montré ses limites. Elle reste un socle indispensable car elle permet de donner des « repères » dans un environnement très mouvant. Elle répond en cela à un besoin de sens qui cohabite, chez les salariés (comme chez les citoyens), avec une demande de plus de participation et d’autonomie. Les communicants ont donc mis en place des dispositifs favorisant l’écoute mais aussi la communication transversale. En cela, ils ont permis de développer des formes de dialogue, voire de collaboration, au sein de leurs organisations.
Tout cela constitue – quand on considère la prééminence persistante du modèle managérial tayloriste dans les entreprises françaises – des avancées remarquables, souvent portées et défendues bec et ongle par les communicants. Mais ceci n’est plus suffisant. Car une nouvelle frontière de la communication est déjà là. Un défi, apparu notamment avec l’accélération des projets de conduite de changement : celui de faire de la communication un levier de modification des comportements. Ce challenge va bien au-delà de celui de la connaissance, la compréhension ou même l’appropriation d’un changement. Il vise à accompagner les collaborateurs dans cette dynamique de changement, en leur permettant d’expérimenter de nouvelles pratiques professionnelles. Car, finalement, le changement n’existe que dans sa concrétisation et son « vécu ». Et les apports des neurosciences et des sciences comportementales nous ont appris que l’argumentation ne suffit pas à déclencher l’action.
Alors, comment initier cette dynamique, à la fois sur le plan individuel et collectif ? Il faut pour cela une conjonction de la vision, de la volonté et de l’énergie du changement. Ceci pose la question de l’alignement « esprit-cœur-corps » et de la capacité à favoriser celui-ci, à travers des démarches collaboratives qui prennent en compte à la fois l’individu et le groupe. Car ce travail d’alignement n’est pas juste introspectif ; il résulte surtout d’un dialogue véritable avec un groupe de pairs. Il nait de l’échange, de la rencontre et de la recherche d’un intérêt commun. C’est à travers ce type de démarches que les communicants – et autres facilitateurs internes – pourront accompagner, non pas les transformations de leur entreprise, mais les collaborateurs de leur entreprise dans ces transformations. C’est en pensant des dispositifs qui permettent de faire émerger l’intelligence collective, mais aussi d’expérimenter concrètement le changement, que les communicants internes réinventeront leur métier.
Béatrice Bétemps-Aufranc, fondatrice et dirigeante de Bé.A.Ba Communication & Aurélie Renard, fondatrice et dirigeante d’Innerside